La Sacristie du Chapitre

 

Dès l'automne 1447, Jacques Coeur avait exprimé son intention de faire construire au bénéfice du chapitre de la cathédrale un vestiaire et une bibliothèque.

 

(Archives départementales du Cher 8 G 150, f° 54 v°, délibération capitulaire du 15 novembre 1447, par laquelle les chanoines acceptent de montrer à Jacques Coeur des endroits aptes à la construction d'un vestiaire et d'une bibliothèque (revetarium et librariam)).

 

Le 10 mars 1448, le chapitre autorisa Jacques Coeur à faire démolir une chapelle donnant sur la maison du grand archidiaconé, sur le flanc nord de la cathédrale, pour y construire le vestiaire. Ce fut chose faite au début de l'été 1449, puisque le 14 juillet, Jacques Cœur demandait la concession du vieux vestiaire pour édifier une chapelle destinée à recevoir les sépultures familiales ; en agréant sa demande, les chanoines le remerciaient de leur avoir procuré un nouveau vestiaire et une bibliothèque ; à cette date, ils en avaient donc pris possession.

 

Une étude récente jette la suspicion sur la destination première de cette sacristie pour laquelle Jean-Yves Ribault avait déjà émis quelques doutes. Il semblerait que la chapelle actuelle dite de « Jacques Cœur » ait été construite non pas pour Jacques Cœur mais pour son fils Jean Cœur alors archevêque de Bourges et que la sacristie du chapitre ait été la chapelle privée de Jacques Cœur et de son épouse Macée de Léodépart. Le vestiaire des chanoines aurait été une construction jouxtant cette chapelle…..

Travée du déambulatoire donnant sur l’entrée de la sacristie : 

 

 

 

Ce décor, composé d'une combinaison des couleurs et emblèmes de Charles VII, couvre l'ensemble d'une voûte sur croisée d'ogives, à quatre voûtains. A la clef de voûte est fixé un grand disque de pierre sculpté d'un soleil doré d'où jaillissent des rayons qui se projettent sur le fond rouge des voûtains semé de petites étoiles. Les amorces de la croisée d'ogives et des arcs doubleaux portent les fleurs de lys sur champ d'azur de l'héraldique royale et sont décorés sur le reste de leur longueur de rubans tressés alternativement blanc et vert, qui forment avec le rouge des voûtains la combinaison des trois couleurs (rouge, blanc, vert) du roi.

 

Des traces, aujourd'hui très effacées, montrent que ce décor peint se continuait sur les piliers de la travée, jusqu'au sol, formant ainsi avec la voûte, une sorte d'arc triomphal à l'entrée de la sacristie.

 

La sacristie s'ouvre par une porte monumentale. Le sommet de l'accolade qui surmonte le tympan présente un grand écu sculpté et peint surmonté d'une couronne royale et porté par un ange. Les armes royales sont recouvertes depuis février 1831 par un cache badigeonné.

 

 

 

L'écusson est entouré de deux phylactères accolés portant l'inscription suivante :

LILIA FRANCORUM, REX KAROLE SEPTIME, REGUM SINT TUA CUM REGNO, SI QUA EST REVERENCIA LEGUM

dont voici la traduction littérale :

 

 Roi Charles sept, que les lys des rois de France te soient acquis avec le royaume, si l'on respecte les lois.

A la pointe même du pinacle et au-dessus de l'écusson royal, se détache au milieu de l’arcature vitrée, un autre écusson sommé d'une tiare pontificale, portant de gueules à deux clefs d'argent en sautoir, les pannetons à l'extérieur, reliées par des lacs d'or, armes personnelles du pape Nicolas V.

 

Sur le vantail de la porte, comme sur le tympan et sur les pilastres, on remarque les armoiries malheureusement bûchées de Jacques Cœur, celles de son fils, Jean Cœur et à droite celles d’Henri d’Avaugour, prédécesseur de Jean Cœur.

 

 

 

Intérieur de la sacristie : L'intérieur de la sacristie se compose de deux travées inégales voûtées sur croisées d'ogives et éclairées par trois fenêtres, deux symétriques à l'est et à l'ouest et une grande baie au nord.

 

Au nord l'arcature de la fenêtre principale est surmontée d'une grande composition sculptée et peinte, qui montre l'écu aux trois fleurs de lys des armes royales, sommé d'une couronne et supporté par deux anges, sur un fond rouge semé de petits soleils

 

d'or. Sous la pointe de l'écusson, se déploie, d'un ange à l'autre, un phylactère qui porte, en deux fois deux vers, l'inscription suivante :

 

 

 

CI EST L'ESCU OU DIEU LE LIZ ANCRA.

 

L'ANGE APORTA L'AMPOLE D'EXELLANCE

 

ET L'ENVOYA AU NOBLE ROY DE FRANCE

 

A SAINT REMY QUI A RAINS LE SACRA

Les deux clefs de voute portent respectivement l'écusson mi-parti Coeur-Léodepart et l'écusson Coeur plein. Les amorces des arcs sont ornées d'un décor peint : sur un fond rouge se détachent des plumes d'autruche et des branches d'orangers, parsemés des lettres R.G (Real Guerdon – Protection Royale), dorées, éléments habituels de l'emblématique de Jacques Coeur.

 

 

Les vitraux : Des verrières qui ornaient les fenêtres ne demeurent aujourd'hui que les vitraux des tympans. Leurs remplages sont occupés presque entièrement, à l'exception d'un Dieu le Père bénissant entouré d'anges rouges dans un grand coeur, par les armoiries de Jacques Coeur et de sa femme, environnées des éléments emblématiques bien connus : entrelacs de branches d'orangers, fleurs, plumes d'autruches bleues et rouges posées en coeur insérant les lettres R.G.

 

Le sommet des lancettes garde aussi le couronnement des dais d'architecture qui encadraient les personnages, disparus depuis longtemps. En 1811, les verrières étaient si dégradées que le vitrier Bouet fut chargé de remplacer ces débris par du verre blanc. A une époque plus récente on y a serti les panneaux armoriés qui ornaient les fenêtres du premier étage : sont ainsi regroupées dans la fenêtre principale les armoiries du pape Nicolas V, du roi Charles VII, de la reine Marie d'Anjou et du dauphin Louis, dans celle de droite, les armoiries Coeur plein et mi-parti Coeur-Léodepart, dans celle de gauche les armoiries d'Henri d'Avaugour et de Jean Coeur ; tous ces panneaux cantonnés de plumes d'autruche bleues et rouges.

 

On est donc réduit à des conjectures en ce qui concerne les sujets représentés dans ces verrières. La Thaumassière, à la fin du XVIIe siècle, note que « le portrait de ce fondateur, et de Macée de Léodepart son épouse, se voit encore dans les vitres de cette sacristie ». Mais dans quelle fenêtre, sous quelle présentation ? Au naturel et en pied ? En donateurs ou sous les traits de saints patrons ?

 

Le mystère reste entier pour les deux verrières latérales.

Les tableaux et les statues : De chaque coté de la porte d’entrée, deux tableaux de P. Tassin (peintre berruyer) datés de 1642 représentant le Mariage de la Vierge et La Présentation de la Vierge au Temple. Ces deux tableaux proviennent de l’ancien couvent des Annonciades. Ensuite, en se tournant vers le mur côté est, on trouve un tableau de St Nicolas suivi de peut-être St Fulgent. Enfin un tableau représentant une Adoration des Bergers (dépôt de la commune de La Chapelle-Hugon). Les statues non identifiée datent des XVIIème et XVIIIème. On peut cependant reconnaitre côté est St Etienne ,St Pierre ainsi qu’une Ste Femme provenant sans doute d’une mise au tombeau où d’un calvaire et du côté ouest  St Paul, St Jean et la Vierge.

         

                                                                   St Etienne                        St Pierre                        Ste Femme

     

    Vierge                             St Jean

La croix archiépiscopale date de 1863 (Orfèvre : Placide Poussielgue-Rusand à Paris) en argent et bronze en partie doré. Poids 4,5kg. A l’avers les médaillons représentent des saints du Berry (St Etienne, Ste Solange et Ste Jeanne de France).

 

 

 

 

 

Le mobilier : Le grand chapier a été installé en 1752 ainsi que les boiseries contre les murs. Au milieu du XIXème siècle, pendant l’épiscopat du cardinal Dupont, des placards ont pris place devant les boiseries pour servir de vestiaire aux chanoines. La commode est du XVIIIème siècle. Le devant d’autel dont la provenance est inconnue représente le Repas chez Simon et est un réemploi du XVIIème siècle.

 

 

 

Sources :

 

 

 

Ribault Jean-Yves. Un hommage de Jacques Coeur à Charles VII. Le décor emblématique de la sacristie capitulaire de la cathédrale de Bourges.

 

Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 136 année, N. 1, 1992. pp. 109-124; doi : 10.3406/crai.1992.15073

 

http://www.persee.fr/doc/crai_0065-0536_1992_num_136_1_15073

 

 


Documents à consulter ou à télécharger

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Croquis de A. des Méloizes entre 1891 et 1897
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A. des Méloizes - Inscription inédite
Paru dans le XVe volume des Mémoires des Antiquaires du Centre (1887-1888)
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